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Entente Québec-Caisse de dépôt : la dernière frontière

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Le gouvernement Couillard ne s’en cache pas. L’entente conclue avec la Caisse de dépôt et placement permet à Québec de développer de coûteux projets d’infrastructures sans alourdir d’autant la dette publique.

Au moment où le gouvernement Couillard justifie l’élimination du déficit de 2,3 milliards de dollars par la nécessité de juguler la dette du Québec, de l’autre main, il dépense 11 milliards de dollars en infrastructures, qui sont directement imputés à la dette.

Une situation qui, à mon avis, menait Québec vers une impasse pour réaliser son plan de réduction de la dette. Selon ce plan, la dette brute devrait passer de 55 % à 45 % du produit intérieur brut d’ici 10 ans. Avec des dépenses importantes en infrastructures, cela paraissait impossible. Et même si cette entente avec la Caisse va de l’avant, cela ne sera pas évident, surtout si la faible croissance économique persiste.

Un moyen pour relancer l’économie

Un autre facteur qui explique la volonté du gouvernement libéral de conclure cette entente avec la Caisse, c’est l’absence d’éléments de relance économique dans les cartons de Québec.

Le chef libéral Philippe Couillard avait promis en campagne électorale d’accroître de 15 milliards de dollars sur 10 ans les investissements en infrastructures. Sans surprise, une fois élu, le premier ministre a fait marche arrière. Le plan de réduction de la dette aurait été irrémédiablement compromis et le ministère des Finances a convaincu le nouveau gouvernement que cela risquait de ne pas plaire aux agences de notation.

Le problème, c’est que le gouvernement libéral n’a plus rien en main pour relancer une croissance anémique. Le Plan Nord est au point mort en raison du prix des métaux et la Stratégie maritime en est à ses balbutiements. De plus, Québec s’apprête à réduire ses investissements dans les infrastructures.

Dans ce contexte, l’entente avec la Caisse de dépôt et placement ressemble à une bouée de sauvetage.

Le retour en douce des PPP

Bien que la Caisse soit un organisme public, les projets d’infrastructures seront réalisés et gérés avec d’autres partenaires qui seront, eux, issus du secteur privé. L’entité corporative qui sera créée avec la Caisse se comportera comme une entreprise privée, avec la volonté de réaliser des profits. En ce sens, c’est bel et bien un retour des partenariats public-privé qui s’annonce avec cette entente.

L’indépendance de la Caisse

Le principe de l’indépendance de la Caisse veut qu’elle doive décider elle-même de ce qui est utile pour atteindre les objectifs de son mandat, soit d’obtenir de bons rendements pour les fonds des Québécois qu’elle gère et de contribuer au développement économique du Québec. À très court terme, je ne crois pas que son indépendance est en péril. À moyen et long terme, cela pourrait être une tout autre chose.

La question des tarifs dans le transport collectif peut aisément devenir un sujet politique brûlant. En fait, chaque nouveau projet d’infrastructure publique développé par la Caisse au Québec risque fort de l’entraîner chaque fois davantage sur le terrain politique. Les intérêts convergents et les liens entre la Caisse et Québec deviendront de plus en plus importants. Les citoyens en viendront à demander des comptes à la Caisse, et pas seulement sur des questions de rendements financiers.

Avec cette entente, la Caisse met le doigt dans un engrenage politique. Malgré les assurances de son PDG Michael Sabia, cela aura nécessairement des effets transformateurs pour l’institution. Et il est évident que ces transformations iront dans le sens d’un rapprochement important avec le pouvoir politique.

La rentabilité des transports collectifs

Michael Sabia rappelle que la Caisse fait de l’argent à l’étranger avec des projets de transports collectifs et qu’il n’y a pas de raison qu’il en soit autrement au Québec. L’argument porte, mais il est utile de se rappeler que les utilisateurs du transport en commun au Québec paient environ 35 % de la facture. Personne ne fait de profit avec cela, au contraire, tout le monde paie, mais cela fait partie du contrat social.

Le transport interurbain par autocar ne va pas très bien non plus au Québec. Des transporteurs veulent se retirer des liens déficitaires en région.

Le train ne va pas beaucoup mieux. Regardez ce qui se passe en Gaspésie. Le projet de train de l’Ouest avec service à l’aéroport Trudeau est attrayant, mais ceux qui connaissent l’autobus 747, qui n’échappe pas aux embouteillages il est vrai, savent qu’on peut se rendre à l’aéroport pour le prix d’un passage régulier de la Société de transports de Montréal.

En cas de problème

Que se passera-t-il si des projets tournent mal? Si la rentabilité n’est pas assurée, si les coûts de réalisation explosent ou si la gestion se révèle déficiente? Encore là, la réalité politique pourrait rapidement rattraper les dirigeants de la Caisse de dépôt, puisqu’il sera normal que les citoyens leur demandent des comptes, ainsi qu’au gouvernement, sur la gestion de la Caisse.

Étrangement, en mettant le pied sur le territoire québécois dans le dossier des infrastructures, la Caisse de dépôt et placement du Québec fait son entrée dans un nouveau monde, avec des règles différentes et où règnent des attentes beaucoup plus élevées.

Dès lors, la Caisse de dépôt et placement risque de se voir irrémédiablement transformée, pour le meilleur et pour le pire.


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